C’est un amalgame de plusieurs motivations qui a conduit Jean Michel Dzouz à prendre son bâton de pèlerin pour un long périple de plus de 1250 kms en 52 jours jusqu’à St Jacques de Compostelle (nommée Santiago en Espagne). Il se souviendra ad vitam æternam de cette année 2012, marquée par son 60ème anniversaire et par ce superbe défi. Passionné de lecture et plus particulièrement de thèmes liés à l’histoire, il a lu de nombreux ouvrages traitant de st Jacques de Compostelle notamment dans la
période moyenâgeuse. Deux autres facteurs le conduisent à prendre la décision de se lancer dans cette belle aventure: d’une part le besoin d’une introspection, d’un bilan de vie pour une importante remise en question et dans un autre domaine, les conseils de pratique sportive de son médecin finissent de le décider dans la réalisation de ce projet.
Après maintes recherches pour préparer son expédition le voilà fin prêt ce jour de Pâques 2012 … une date loin d’être anodine puisqu’elle s’inscrit dans son histoire familiale par la mort de son arrière grand père, qui pope orthodoxe a été fusillé ce jour-là dans son église.
« Le chemin commence au seuil de sa demeure » et c’est avec cette pensée que Jean Michel, avec en main son bâton sur lequel il a gravé les prénoms de ses enfants, quitte les berges du Canal à destination de St Jacques de Compostelle. Un départ qu’il effectue discrètement, puisque seuls ses enfants et sa maman ont été mis dans la confidence.
Pour les premières étapes qui longent le GR 78 du Piémont Pyrénéen, il suit les conseils de Sœur Françoise de l’Abbaye de Carcassonne qui lui a indiqué les possibilités d’hébergement dans l’Aude. Sa première halte pour une nuitée va mettre à mal la discrétion de son voyage : En effet à Arzens, un lieu d’accueil pour les pèlerins jacquaires vient d’être créé, il en est le premier bénéficiaire et le correspondant local est là. Ainsi donc l’info finit dans le journal avec photo à l’appui, avisant ses proches et amis. Durant 52 jours, avec une moyenne de 25 à 30kms par jour, (mis à part une journée à Lourdes), il a tout de même passé près de 3 semaines, seul sous la pluie, sur les chemins de l’Aude et l’Ariège. Ses haltes pour la nuit diverses et variées, dans des auberges, maison d’autochtones hospitaliers…, lui permettent de belles rencontres humaines. Il nous confie que le rituel en soirée d’un pèlerin consiste tout d’abord à libérer ses pieds des pataugas et de faire sa lessive quotidienne puisqu’il n’ emporte du linge que pour 3 jours.
Au cours de ces premières semaines et ces kilomètres, seul face à lui-même, Jean Michel peut laisser libre cours à ses pensées sans qu’aucune interférence vienne entraver ce besoin de réflexion, qui sur le plan moral et spirituel avait motivé son pèlerinage… une méditation qu’il couche au quotidien dans son journal de voyage
Le choix de cette période pour un tel périple n’est pas non plus sans conséquences, puisqu’il subit trois fois la neige et conserve sa reconnaissance à une rencontre qui lui offrira une veste plus protectrice que les vêtements qu’il avait emporté.
Pour mériter au bout du voyage « La compostela », cette reconnaissance (rédigée en latin) du chemin parcouru, délivrée par les autorités religieuses, les pèlerins doivent dans un livret se faire apposer chaque jour les tampons qui témoignent des étapes traversées.
De cette expérience, notre pèlerin ramène une once de déception, notamment le fait de n’avoir pu croiser que peu de représentant de la foi dans sa traversée des départements pyrénéens français. Sur le territoire espagnol, c’est l’exploitation commerciale de ce chemin de Compostelle qui provoque pour lui quelques regrets… Les divers chemins qui mènent à St Jacques convergent de manière plus conséquente sur les dernières centaines de kilomètres… et là notre voyageur a trouvé une baraque à frites dans les bois, quantité de commerces qui mentionnent qu’ils ont le « tampon témoin » , des kilomètres en bordure de grandes routes … en conclusion notre Trébéen conserve plus de souvenirs authentiques de nos belles Pyrénées que des dernières étapes.
Pour l’anecdote, sur les photos de fin de voyage vous remarquerez que Jean Michel a deux bâtons…en fait son précieux compagnon de départ s’est rompu dans l’effort, mais pas question de s’en séparer… un rafistolage au chatterton, un autre bâton trouvé dans la nature pour épargner le 1er et c’est avec qu’il est revenu à Trèbes. Autre détail cocasse : au cours de cette pérégrination qui le tenait bien éloigné des préoccupations des français, c’est par hasard qu’il a appris, à la une d’un journal espagnol, l’élection du nouveau président le 6 mai dernier.
C’est un homme profondément changé qui nous est revenu… enrichi de réponses à ses interrogations, plus fort et plus serein d’une autre perception de lui-même et de ceux qui l’entourent.
Il partage avec nous des photos de cette belle expérience