C’est officiel depuis mardi, Serge et Martine Bérard, qui aspirent à un légitime repos, tirent leur révérence tout en douceur, en passant le relais à Patrice Poy-Marti et Myriam, sa compagne. Après un bac économique et social, Patrice est arrivé en ces murs il y a 13 ans, pour seulement un job d’été et finalement, n‘en est jamais reparti. Entré au service en salle, il a aussi régulièrement remplacé Serge en mettant la main à la pâte… À pizza bien sûr.
La confiance s’est installée, et Serge et Martine lui ont donné de plus en plus de responsabilités. Notamment celle de les seconder auprès des jeunes qui ont été formés dans ce restaurant, certains sortis majors de promotion. Patrice, qui encadrait « l’équipe service », transmettait à son tour toutes les valeurs de la profession qui lui avaient été inculquées par ses patrons. Ces dernières années, ils lui confiaient aussi les clés et la gestion de l’établissement en leur absence.
Martine et Serge laissent aujourd’hui cet établissement qu’ils ont créé et développé, à celui qui les a accompagnés tout au long de cette aventure… À leur fils spirituel en somme.
Patrice, affectueusement nommé Poy (Poï), prend ici les rênes sur de solides bases puisqu’il garde le personnel en cuisine et en salle. Myriam, sa compagne depuis 10 ans, le rejoint dans ce nouvel engagement synonyme de tournant majeur dans la vie de ce jeune couple. Ensemble, ils apporteront à la clientèle une continuité dans l’esprit «El Campo» qui fait sa renommée et auquel Patrice a contribué. Au fil du temps, il y ajoutera bien évidemment sa patte.
Sous la fine plume de Franck Alberti l’Histoire d’El Campo
Le 27 novembre 2004 a eu lieu à Trèbes la plus aléatoire mais néanmoins trépidante inauguration qu’un restaurant a pu connaître dans toute l’Occitanie depuis que l’homme a inventé les normes…
Depuis ce jour là, El Campo n’a pas cessé d’écrire ses lettres de noblesse sous la houlette de Martine et de Serge qui ont accepté sous mon insistance de traverser l’avenue des Capucins du côté pair au côté impair. Lors du repas « d’entrée » de la rue du castela, un éclair déchira le ciel pour laisser place à une belle amitié entre deux mecs aux grands cœurs. Peu à peu, les objets et les Hommes ont pris leurs places dans l’établissement, les tonneaux et autres outils de la vigne étaient figés en déco avec, en apparence, les initiales des heureux donateurs, FA par ici, CB et JP par là comme autant de clins d’œil qui illuminent les lieux encore aujourd’hui.
Mais le plus fort à cet endroit, c’est la table, celle de René en rentrant à droite, a l’emplacement même où se trouvait jadis la Mercedes de l’oncle Cougnenc. Cette table à tout vu et tout entendu, des fous rires les plus fous aux discussions sérieuses les plus sérieuses. Autour de cette table, 1000 fois le monde a été refait et parfois en réalité… Tres Bes, les expositions, le club taurin, les campagnes politiques de tous bords, l’origine du retour des corridas formelles à Carcassonne en 2010 même si on ne sait toujours pas « qui a commandé »…
Tant de choses ont démarré ici sous l’oeil malicieux de l’ami Daniel Dumas qui a eu la bonne idée de casser son fusil sur l’épaule pour ne blesser personne et celui inquiet de l’artiste Alain Clinard dont les oeuvres, qui donnent vie aux murs, captent plus de lumière qu’il n’en rentre par les fenêtres.
En transmettant au Poï qui fait partie des meubles depuis le début de l’aventure, Serge et Martine cultivent l’idée selon laquelle El Campo n’est pas qu’un simple restaurant mais un endroit où les gens viennent d’abord pour venir et ensuite pour manger comme Denis qui venait tous les lundis, Guigue tous les vendredis et Jeff à chaque fois qu’on ne l’attendait plus… L’ancien Monastère des Capucins sera devenu au fil des ans un lieu de mémoire culinaire et festive et il appartient désormais au Poï de reprendre le capuce pour perpétuer la pieuse tradition en réinventant de nouveaux sujets de connivence pour les fidèles et les nouvelles ouailles qui n’aspirent qu’à percer le secret du miracle du vin, ce secret qui doit refaire de l’homme ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : l’ami de l’homme.
Nous avons conservé ceci ! Une pensée pour Daniel, grand ami de Martine et Serge, qui avait signé ce papier!